Bilan 2019
Sources : China Daily, Global Weekly, du 13 décembre 2019 et du 20 décembre 2019 / F. Schaeffer pour Les Echos du 20 janvier 2020 / Prévisions Standard Chartered Bank.
Pour 2019, la croissance du PIB s'est maintenue à un niveau de 6,1%, dans la fourchette gouvernementale prévue (6-6,5%), en repli par rapport à 2018 (6,6%). Ce niveau reste élevé malgré les contraintes extérieures (guerre commerciale) et intérieures (restrictions de crédit en lien avec le désendettement) ; l'Etat a par ailleurs assoupli sa ligne en soutenant davantage les PME (baisses des taxes et assouplissement des restrictions de crédit), ce qui a permis d'atteindre l'objectif (le stimulus fiscal aurait fait gagner 1,8 point de croissance, d’après la Standard Chartered Bank). Sur les deux derniers trimestres de l'année, la croissance est restée stable à 6%, montrant la résilience de l'activité économique et validant la thèse de l'atterrissage progressif de la croissance à moyen terme. L'activité économique a donc vu la consommation prendre un peu plus le relai des exportations, dans un mouvement que le gouvernement chinois aimerait voir s'accentuer encore. Cette consommation a été dopée par le relèvement du seuil de d'imposition sur le revenu, qui participe également de la politique de réduction des inégalités. Entreprises et particuliers confondus, ce sont 2 000 milliards de yuans (262 milliards d'euros) d'allègement de taxes qui ont été consentis sur l'année. L'objectif de croissance pour 2020 sera dévoilé en mars, et devrait être autour de 6% (Standard Chartered Bank). Mais cet objectif pourrait être rendu plus flexible, pour permettre une croissance davantage qualitative que quantitative. Un taux de croissance de 6% environ permettra d'atteindre l'un des objectifs du centenaire (centenaire du parti communiste en 2021), qui prévoyait de doubler le PIB de 2010 en 10 ans. L'objectif 2020 ne pourra, comme en 2019, être atteint sans le soutien de l'Etat, qui prévoit de nouveaux assouplissements dans sa politique de désendettement.
Mais les efforts de baisse de la fiscalité ne pourront être renouvelés dans cette proportion, aussi celui-ci prévoit-il (réunion du Bureau Politique du Comité Central du PCC du 6 décembre 2019) un glissement vers une hausse des dépenses (infrastructures notamment) qui semblent avoir un meilleur effet de levier. Le gouvernement central prévoit toutefois de pousser les gouvernements locaux à rationaliser leurs dépenses et à contenir les hausses, tout en faisant appel à l’émission d’obligation dès le niveau local. Le déficit du budget de l'Etat s'est établi à 2,8% du PIB, quand le budget global (budget de l'Etat et budget des gouvernements locaux réunis) est en déficit de 6,5% en 2019 (contre 4,7% en 2018). Pour 2020, la Standard Chartered Bank prévoit que le déficit de l'Etat se maintiendra sous les 3% et un déficit du budget global du même ordre que celui de 2019.
En matière de politique monétaire, la Banque du Peuple devrait rester réfractaire à toute idée de quantitative easing et rester aussi loin que possible des taux d’intérêts négatifs. Le taux de réserve des banques pourrait être assoupli de 50 points de base au début des trois premiers trimestres de l’année 2020 (la première baisse a été effective au 1er janvier), d’après Stantard Chartered Bank. Les taux directeurs à moyen terme pourraient être abaissés de dix points de base, au premier et au second trimestre.
Le rythme des créations d’emploi s’est révélé excellent, puisque l’objectif de 11 millions d’emplois créés a été atteint dès le début octobre. Le taux de chômage s’établissait à 3,6% en zone urbaine en septembre (en baisse sur l’année) et à 5,2% sur le territoire (l’objectif était de 5,5%).
L’inflation est remontée à son plus haut niveau depuis 2011, avec un taux de 4,5% en rythme annuel pour les deux derniers mois de l’année, alors qu’elle avait été contenue sous les 3% jusqu’en septembre.
Pauvreté. Sur l'année 2019, 10 millions de personnes ont à nouveau été sorties de la pauvreté, ce qui devrait permettre pour 2020 l'éradication totale de la grande pauvreté.
Concernant les Nouvelles routes de la Soie, la Chine prévoit le lancement d'une nouvelle phase en 2020, avec une coopération approfondie avec les villes situées sur ces routes, et la promotion d'un développement davantage qualitatif. 18 000 trains ont circulé entre 110 villes sur 2019 et 409 nouvelles routes aériennes ont été créées.
Démographie : 14,6 millions de naissance ont eu lieu en 2019 (Bureau national des statistiques), soit une baisse de 4% par rapport à 2019 et un taux de natalité d'une faiblesse record (10,4 naissances pour 1000 habitants). La politique de relance de la natalité connaît donc une impasse, et le vieillissement continue de s'accentuer. L'économiste Patrick Artus de Natixis, interrogé par F. Schaeffer, estime que : "Le vieillissement démographique conduit à une forte tension du marché du travail, à une hausse rapide des salaires et des coûts salariaux unitaires. Conjugué aux surcapacités de production des entreprises chinoises, le mélange est explosif."
L’année 2019 a donc finalement été économiquement une bonne année pour l’économie chinoise et notamment pour les entreprises du secteur privé. Celles-ci, après avoir pâtit de la guerre commerciale, ont pu rattraper leur retard grâce à une consommation accrue, et des charges en baisse. La fin de la guerre commerciale pour 2020 devrait leur rouvrir des perspectives, même si les arrivées d’importations américaines (200 milliards de dollars promis par l’accord) devraient leur faire concurrence. Le marché chinois sera donc le lieu d’une concurrence accrue, d’autant plus qu’il sera toujours en croissance. Un bémol est à mettre concernant le Coronavirus, qui ralentit et l’activité de production, et la consommation au mois de janvier et qui devrait être actif au moins jusqu’à mi-février. D’autre part, l’inflation qui est repartie devrait rendre les entreprises occidentales mécaniquement plus compétitives sur ce marché et leur permettre d’y améliorer leur marge.
A long terme, la situation démographique est préoccupante, et explique le plein emploi qui est déjà la norme. D’ici cinq à dix ans, le vivier démographique devrait sensiblement se resserrer et provoquer de grandes tensions sur le marché du travail, mais aussi provoquer une hausse substantielle des salaires. Enfin, la priorité donnée aux entreprises d’Etat, qui est un marqueur de la politique de Xi Jinping et devrait donc se poursuivre, risque à long-terme de freiner le dynamisme du tissu de PME. A ce propos, Patrick Artus de Natixis soulève justement la question lancinante de leurs énormes surcapacités (Les Echos, 20 janvier 2020). Un point de vigilance important pour les investisseurs étrangers en Chine est donc de regarder si le secteur ciblé n’est pas déjà occupé par une entreprise d’Etat.